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PRINCESSE BELGIOJOSO


Ce fut l’exil qui fit de la princesse Belgiojoso une voyageuse. Née le 28 juin 1808, Christine Trivulzia avait épousé à seize ans le prince Emile Belgiojoso ; elle est morte en 1871, après une existence traversée de bien des changements. Passionnément éprise de la liberté de l’Italie, il lui fut impossible de se résigner à vivre à Milan, sous le joug pesant de la domination autrichienne, et elle vint s’établir à Paris, où son rang, sa fortune, son amour des lettres et des arts, firent de son salon un centre littéraire, tandis que ses opinions libérales y attiraient beaucoup de personnages politiques. Parmi ses amis elle compta entre autres M. Mignet et M. Augustin Thierry, dont elle dépassa rapidement les idées. En 1848, elle se plongea avec toute l’ardeur d’une nature méridionale dans le mouvement révolutionnaire qui balayait toutes les contrées de l’Europe, des Carpathes aux Alpes, de Paris à Berlin. La princesse Belgiojoso courut à Milan, qui avait expulsé sa garnison autrichienne, et elle équipa à ses frais un corps de deux cents volontaires ; mais les baïonnettes de Radetzky rétablirent en Milanais l’autorité de l’Autriche ; la princesse fut obligée de fuir, et ses biens furent mis sous séquestre. Pendant la fièvre insurrectionnelle qui éclata à Rome l’année suivante, elle se fraya sans peur un chemin au milieu des combattants, et dirigea en personne le service des ambulances. Mais à la suite de toutes ces secousses politiques elle dut quitter l’Italie, et se décida à fixer sa résidence en Orient. À Constantinople, elle fonda un asile pour les filles des émigrants italiens. Bientôt elle se lassa de la Turquie