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mère contre les emportements de M. de Repentigny, car elle se promettait bien de ne la quitter jamais.

Sous un extérieur enjoué, Léonie cachait un grand fonds de fermeté. Mais, ainsi que son père, elle avait des passions très-fougueuses, qu’elle ignorait encore elle-même. Seulement, au lieu d’être des passions d’esprit comme les siennes, c’était des passions de cœur. Jusqu’alors sa tendresse pour sa mère et une vive affection pour quelques personnes de leurs entours avaient suffi aux aspirations de son âme. S’assurer l’empire sur le mari qu’on lui destinait, afin de n’avoir pas à souffrir comme madame de Repentigny, était l’unique souci de Léonie.

La mère et la fille n’avaient de contentement que quand elles étaient ensemble. On peut donc juger des angoisses de la première en apprenant la veille, vers huit heures du soir, que le vapeur qui lui ramenait sa fille de Toronto brûlait, à deux lieues de Montréal ; on peut juger des expansions de sa félicité en la retrouvant sauve et bien portante auprès d’elle.

Sans être aussi démonstrative, la joie de Léonie égalait celle de madame de Repentigny.

Pelotonnées dans leur voiture, chacune un bras passé autour de la taille de l’autre, se couvant du regard, se baisant à chaque propos, elles ressemblaient plutôt à deux sœurs étroitement liées, qu’à une mère à son automne et une fille à son printemps, car madame de Repentigny était belle encore, surtout quand le bonheur