vôtre, je voudrais bien en avoir une comme ça, moi : être souveraine d’une tribu sauvage jusqu’à vingt ans, puis, tout à coup, rencontrer un parent, comme mon cousin Cherrier, qui vient de la Louisiane, dans le désert, exprès pour moi, m’enlève à mes sujets et me marie[1]. Vraiment, Louise, vous avez eu trop de bonheur ! J’envie votre sort !
Celle à qui s’adressait cette réflexion traîna vers son mari un long regard d’amour.
— Ce serait juste, si vous aviez dit que le trop heureux, c’est moi, dit-il.
— Égoïste ! murmura joyeusement Louise.
— Mais, s’écria Xavier, de quoi vous plaignez-vous, ma belle cousine ! vous avez parmi vos galants un gentilhomme accompli…
— Sir William ! ripostait-elle avec une moue dédaigneuse.
— Il est très-riche, titré…
— C’est la moindre de mes préoccupations.
— Il vous adore…
— Et je le déteste.
— Hypocrite, va ! dit Xavier en la poussant légèrement du genou.
- ↑ Cette locution, comme une foule d’autres employées en Normandie, est très-usitée au Canada, même dans la haute classe de la société.