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nées. Malgré les malheurs qui avaient abreuvé sa jeunesse, et malgré les tribulations nombreuses qui avaient assailli son âge mûr, il se tenait droit, vert et ferme comme un chêne robuste que l’ouragan a pu agiter sans le courber jamais.

Ni-a-pa-ah, au contraire, avait profondément ressenti les coups de l’infortune. Elle n’était qu’à l’été de la vie, et déjà une caducité précoce ployait sa taille en deux. Ses cheveux si noirs, si abondants autrefois, avaient tombé et blanchi. Un inextricable réseau de rides sillonnait en tous sens son visage osseux ; de larges coutures jaunâtres tranchaient sur le ton généralement bistré de sa peau et ne rappelaient que trop les atroces tortures auxquelles la pauvre squaw avait été soumise sur le mont Baker.

Ses mains brûlées n’offraient plus que des moignons informes dont elle était incapable de faire usage, même pour prendre ses aliments. De ses charmes flétris, il ne lui restait que les yeux, — ces yeux si éloquents dont le rayonnement sympathique reflétait tant d’amour et de mélancolie.

Son amour, elle l’épanchait tout entier, maintenant, sur Co-lo-mo-o, l’enfant qu’elle avait eu de Nar-go-tou-ké, un an après leur rentrée de la Nouvelle-Calédonie au Canada.

Né en 1818, le Petit-Aigle avait donc alors vingt ans passés. Beau et vaillant jeune homme s’il en fut. Il tenait de race. Taille élevée, bien prise, membres vigou-