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LE JARDIN PARFUMÉ

— J’aime mieux l’ancienne, dit Baloul, avec elle seule j’ai du bonheur ; la nouvelle ne me procure aucun plaisir :

— Eh ! pourquoi ?

— Parce qu’elle n’est pas riche.

— Tu crains donc la pauvreté, bouffon ? Dis-nous cela.

Alors Baloul chanta :

Je suis pauvre et je serai toujours pauvre,
Je suis pauvre à faire pitié ;
Je suis pauvre et le monde fuit ma misère,
Je suis pauvre et n’ai plus d’amis.
Je suis pauvre et prie Dieu d’être seul aussi malheureux ;
Je suis pauvre et honteux de mon dénûment,
Je suis pauvre et m’y habitue comme ma chemise fait à ma peau ;
Je suis pauvre et vais abandonner ma maison et la laisser seule.

— Tu veux quitter ta maison, reprit le Sultan, et où veux-tu donc aller ?

— Je veux aller chez Dieu, chez le prophète, ou chez toi, Sultan.

— Bien répondu, Baloul, celui qui demandera l’hospitalité à Dieu, au prophète ou au Sultan, sera toujours le bienvenu. Mais tu parlais tout à