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LE PARFUM DES PRAIRIES

Sid-el-Adj-Ali ben Turqui, musulman pieux et lettré qui revenait de son troisième voyage de La Mecque ; et enfin Nefissah, la belle et gracieuse Mauresque à laquelle je dois le travail que je vous prie d’accepter.

Le Crodja Mohammed était un homme de trente ans, d’une taille élancée, maigre de figure, aux pommettes saillantes, au nez d’aigle ; ses yeux avaient le feu de la fièvre ; son teint bilieux et sa lèvre fine, qui se crispait à la moindre impression, faisaient songer qu’il eût été un aussi brillant guerrier qu’il était parfait écrivain.

Du reste, ses ancêtres avaient fait parler la poudre ; son père suivit Abd-el-Kader dans toutes ses expéditions, et Mohammed lui-même avait assisté, bien jeune, à quelques épisodes de la Guerre Sainte, épisodes qu’il racontait avec émotion.

Mais après la reddition du grand Chef, sa famille, préférant la liberté à ce que nous appelons la civilisation, gagna le Sud, où elle s’enfonça davantage à mesure que nous agrandissions nos conquêtes, établissant sa tente sous l’œil de Dieu — le souverain maître — tandis que l’enfant, fait prisonnier, fut ramené à Alger. Là, son intelligence précoce, remarquée de quelques officiers de notre armée, le