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Divers conseillers parlèrent diversement.
Ils argumentèrent et retournèrent la chose en tous sens,
ils mirent en avant mainte raison subtile,
ils parlèrent de magie et de tromperie,
mais finalement, en conclusion,
ils ne purent voir là nulle ressource,
ni d’aucune autre façon, sauf par mariage.

À ceci alors ils virent tant d’obstacles
en raison, pour le dire bien clairement,
220 étant donné qu’il y avait une telle différence
entre les lois des deux pays, qu’ils déclarèrent
ne pouvoir croire qu’un prince chrétien voulût de plein gré
marier sa fille sous nos chères lois
que nous avons apprises de notre prophète Mahomet.

Mais lui répondit : « Plutôt que de perdre
Constance, certes je veux être baptisé.
Il me faut être à elle, je n’ai pas d’autre choix.
Je vous en prie, tenez cois vos arguments,
sauvez-moi la vie, et ne soyez pas négligents
230 à me procurer celle qui tient ma vie en son pouvoir
car en ce tourment je ne saurais demeurer longtemps. »

Qu’est-il besoin de plus d’amplification ?
Je dis que, par traité et par ambassade
et par la médiation du pape,
et par toute l’Église et toute la chevalerie,
afin de détruire la loi de Mahom
et faire croître la précieuse loi du Christ,
ils se sont mis d’accord, comme vous allez l’entendre :

À savoir que le sultan et ses barons
240 et tous ses hommes liges devraient être baptisés,
et qu’il obtiendrait Constance en mariage
avec telle quantité d’or, je ne sais laquelle,
et qu’à cet effet il donnerait des garanties suffisantes.
Ce même accord fut juré de part et d’autre.
Maintenant, belle Constance, que le Dieu tout-puissant te guide !

Maintenant certains, j’imagine, s’attendraient
à ce que je dise tout l’équipage