Page:Chatelain - Beautés de la poésie anglaise, tome 1, 1860.djvu/47

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Survient enfin l’hiver ; encore Dieu commande :
« Assez ! gardez le reste et bien soigneusement ! »
À cet ordre l’hiver jette sa houppelande
Sur la Nature… et puis s’endort complètement !



Au Squelette Articulé.



d’un pied de femme, exposé à l’étalage du cordonnier Dowie, auquel les vers originaux furent envoyés anonymement.


Triste fragment sans chair d’une taille de fée
Bijou de la nature, et son dernier trophée,
De la vie échauffé naguère par le feu,
Quelle profane main t’infligea la parure
D’un soulier de cristal, d’un soulier sans couture
Pour te faire honnir, ou louer en tel lieu ?

Du grand œuvre de Dieu l’observateur intime,
Admire en toi le goût de l’ouvrier Sublime
Mille fois plus encor qu’alors que pied mignon
Dans un salon, le fat suivait tes faits et gestes,
Proclamait et bien haut tes entrechats … célestes,
Te dardant de son œil incrusté d’un lorgnon.

Que tous ces mirmidons dont l’art consiste à faire
La démarcation de poussière à poussière
Devinent si ton rang fut noble ou plébéien ?
Ils ne le pourront prou—le Dieu puissant et sage
À tous également a donné son image,
C’est l’homme seul qui fait les Rois, les gens de rien !

Peut-être trônais-tu jadis en grande pompe
Dans des salons dorés,—mais non pas ! je me trompe,
Les cadavres pourris des Grands et des Heureux
Sont logés dans le marbre, et loin de la roture