Page:Chateaubriand - Œuvres complètes - Génie du christianisme, 1828.djvu/266

Cette page n’a pas encore été corrigée

votre sommeil, riches de la terre, et demeurez dans votre poussière[1].

" Pourquoi le jour a-t-il été donné au misérable, et la vie à ceux qui sont dans l’amertume du cœur[2] ? "

Jamais les entrailles de l’homme n’ont fait sortir de leur profondeur un cri plus douloureux.

" L’homme né de la femme vit peu de temps, et il est rempli de beaucoup de misères[3]. "

Cette circonstance, né de la femme est une redondance merveilleuse ; on voit toutes les infirmités de l’homme dans celles de sa mère. Le style le plus recherché ne peindrait pas la vanité de la vie avec la même force que ce peu de mots : " Il vit peu de temps, et il est rempli de beaucoup de misères. "

Au reste, tout le monde connaît ce passage où Dieu daigne justifier sa puissance devant Job en confondant la raison de l’homme : c’est pourquoi nous n’en parlons point ici.

Le troisième caractère sous lequel il nous resterait à envisager le style historique de la Bible est le caractère pastoral ; mais nous aurons occasion d’en traiter avec quelque étendue dans les deux chapitres suivants.

Quant au second style général des saintes lettres, à savoir la poésie sacrée, une foule de critiques s’étant exercés sur ce sujet, il serait superflu de nous y arrêter. Qui n’a lu les chœurs d’Esther et d’Athalie, les odes de Rousseau et de Malherbe ? Le traité du docteur Lowth est entre les mains de tous les littérateurs, et La Harpe a donné en prose une traduction estimée du Psalmiste.

Enfin, le troisième et dernier style des livres saints est celui du Nouveau Testament. C’est là que la sublimité des prophètes se change en une tendresse non moins sublime ; c’est là que parle l’amour divin, c’est là que le Verbe s’est réellement fait chair. Quelle onction ! quelle simplicité !

Chaque évangéliste a un caractère particulier, excepté saint Marc, dont l’Evangile ne semble être que l’abrégé de celui de saint Matthieu. Saint Marc, toutefois, était disciple de saint Pierre, et plusieurs ont pensé qu’il a écrit sous la dictée de ce prince des apôtres. Il est

  1. Orais. fun. du chancelier Le Tellier.(N.d.A.)
  2. Job, chap. III, v. 20. (N.d.A.)
  3. Job, chap. XIV, v. 1. (N.d.A.)