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autant que belle. Parfois même, et ceci est très original, son ambition, semble-t-il, était autre. Il s’agissait alors simplement de développer son être intellectuel et moral, d’embellir sa vie. C’était lui-même, dans ce cas, qui était la matière première de l’œuvre d’art à créer.

De bonne heure il songea à s’établir dans le lieu le plus favorable à la réalisation de ces beaux projets. Dégoûté du milieu somnolent où s’était écoulée sa jeunesse, il rêva un instant, vers 1887, d’aller vivre à Paris. Mais bientôt Georges Rodenbach l’introduisait, avec Maeterlinck et Le Roy, à la Jeune Belgique, qui, depuis quelques années, groupait la plupart des jeunes écrivains belges, ambitieux de donner à leur pays une littérature. À partir de 1888 il collabora aussi à la Wallonie, revue d’avant-garde fondée par le Liégeois Albert Mockel, qui était l’organe belge du mouvement symboliste.

À partir de cette époque van Lerberghe abandonne son dessein d’aller vivre à Paris. Il quitte pourtant sa ville natale, et, vers 1890, s’installe dans un appartement, à Schaerbeek, faubourg de Bruxelles. Ce n’est, toutefois, que pour quelque temps. Il compte désormais, selon ses propres termes, vivre en « vagabond », en « nomade » il ne se fixera nulle part, et cherchera partout dans le monde l’endroit où il pourra le mieux se développer en tant que poète et en tant qu’homme.

Son séjour à Bruxelles devait cependant se prolonger. Il avait entrepris, sur le conseil d’un ami peut-être mal inspiré, de faire, à l’université de