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N’eurent rien de pareil en leur architecture,
À nos riches palais d’éternelle structure
Ainsi le jeune chêne en son âge naissant,
Ne peut se comparer au chêne vieillissant,
Qui, jetant sur la terre un spacieux ombrage,
Avoisine le ciel de son vaste branchage.


Mais c’est peu, dira-t-on, que, par un long progrès,
Le temps de tous les arts découvre les secrets ;
La nature affaiblie en ce siècle où nous sommes,
Ne peut plus enfanter de ces merveilleux hommes,
Dont avec abondance, en mille endroits divers,
Elle ornait les beaux jours du naissant univers,
Et que, tout pleins d’ardeur, de force et de lumière,
Elle donnait au monde en sa vigueur première....


À former les esprits comme à former les corps,
La nature en tout temps fait les mêmes efforts ;
Son être est immuable ; et cette force aisée
Dont elle produit tout, ne s’est point épuisée
Jamais l’astre du jour, qu’aujourd’hui nous voyons,
N’eut le front couronné de plus brillants rayons ;
Jamais, dans le printemps, les roses empourprées,
D’un plus vif incarnat ne furent colorées ;
Non moins blanc qu’autrefois brille dans nos jardins
L’éblouissant émail des lis et des jasmins,
Et dans le siècle d’or la tendre Philomèle,
Qui charmait nos aïeux de sa chanson nouvelle,
N’avait rien de plus doux que celle dont la voix
Réveille les échos qui dorment dans nos bois.
De cette même main les forces infinies
Produisent en tout temps de semblables génies.