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Je ne puis m’éloigner de vous
Sans le pardon d’avoir su vous déplaire ;
Je puis souffrir le poids de ma misère,
Mais je ne puis, Seigneur, souffrir votre courroux ;
Accordez cette grâce à mon regret sincère,
Et je vivrai contente en mon triste séjour
Sans que jamais le Temps altère
Ni mon humble respect, ni mon fidèle amour.

Tant de soumission et tant de grandeur d’âme
Sous un si vil habillement,
Qui dans le cœur du Prince en ce même moment
Réveilla tous les traits de sa première flamme,
Allaient casser l’arrêt de son bannissement.
Ému par de si puissants charmes,

Et prêt à répandre des larmes,
Il commençait à s’avancer
Pour l’embrasser,
Quant tout à coup l’impérieuse gloire
D’être ferme en son sentiment
Sur son amour remporta la victoire,
Et le fit en ces mots répondre durement

De tout le temps passé j’ai perdu la mémoire,
Je suis content de votre repentir
Allez, il est temps de partir

Elle part aussitôt, et regardant son Père
Qu’on avait revêtu de son rustique habit,
Et qui, le cœur percé d’une douleur amère,
Pleurait un changement si prompt et si subit
Retournons, lui dit-elle, en nos sombres bocages,
Retournons habiter nos demeures sauvages,