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toujours les biens sont mêlés de quelques maux, le ciel permit que la reine fût tout-à-coup attaquée d’une âpre maladie, pour laquelle, malgré la science et l’habileté des médecins, on ne put trouver aucun secours. La désolation fut générale. Le roi sensible et amoureux, malgré le proverbe fameux qui dit que l’hymen est le tombeau de l’amour, s’affligeait sans modération, faisait des vœux ardens à tous les temples de son royaume, offrait sa vie pour celle d’une épouse si chère ; mais les dieux et les fées étaient invoqués en vain. La reine, sentant sa dernière heure approcher, dit à son époux qui fondait en larmes : « Trouvez bon, avant que je meure, que j’exige une chose de vous : c’est que s’il vous prenait envie de vous remarier… » À ces mots, le roi fit des cris pitoyables, prit les mains de sa femme, les baigna de pleurs ; et l’assurant qu’il était superflu de lui parler d’un second hyménée : « Non, non, dit-il enfin, ma chère reine, parlez-moi plutôt de vous suivre. — L’état, reprit la reine avec une fermeté qui augmentait les regrets de ce prince, l’état doit exiger des successeurs, et comme je ne vous ai donné qu’une fille, vous presser d’avoir des fils qui vous ressemblent : mais je vous demande instamment, par tout l’amour que vous avez eu pour moi, de ne céder à l’empressement de vos peuples que lorsque vous aurez trouvé une princesse plus belle et mieux faite que