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ET LES JOURS

res de la nuit quand on est éveillé. Il se tourne sur le côté et ferme les yeux. « Cette inquiétude est intolérable ». Il se sent profondément malheureux.

Il allume la petite lampe de chevet et consulte son bracelet-montre : deux heures. Demain, il verra son médecin. « Vous êtes atteint d’une maladie de cœur, condamné désormais à l’inaction totale. » Non, non, mon Dieu, ne m’abandonnez pas ! « C’est un malaise passager. Vous avez eu tort de vous affoler. Votre cœur survivra à tous les autres organes. » Pourtant le mal est là. « Musculaire, mon cher député… »

À côté de lui, Marguerite dort profondément, le corps replié en chien de fusil, épuisée par les mille petits soins que réclame un nouveau-né. Il s’étend sur le dos, la tête appuyée sur les paumes. Ainsi, il ressent son mal. Il éprouve le besoin de se familiariser avec la douleur puisque, pense-t-il, il leur faudra désormais vivre ensemble.

Il compare son sort à celui de Julien Pollender, son collègue à la Chambre et le plus jeune député de la législature. Pollender est riche, fort comme un chêne, intelligent… Il n’a que