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LES DÉSIRS

elle ne trouve pas le mot qu’il attend, elle ne le reverra plus.

— Pierre, dit-elle.

— Oui ?

— Rien…

— Oui, vous avez quelque chose à me dire.

— Je n’ai rien à me reprocher, dit-elle.

— Alors, quittez votre emploi.

— Je ne puis pas.

Lucienne entre dans le petit appartement qu’elle partage avec une compagne de travail. Anna n’est pas sortie. Devant le visage défait de Lucienne, elle devine la scène qui vient de se passer.

— Les hommes sont tous pareils, dit-elle.

— Je ne m’explique pas, dit Lucienne qu’il m’ait quittée ainsi. J’ai froissé son orgueil. Mais je sens qu’il m’aime. Il voulait me trouver une place, ajoute-t-elle les yeux pleins de larmes.

— Pourquoi as-tu refusé !

— Je ne sais pas. Par fierté peut-être, parce que je voulais me montrer indépendante.

— Quand on n’a que son beau minois pour dot, on laisse l’indépendance de côté. Je ne te conseillerais pas de tout céder, tu comprends,