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Elle ne voulut pas entendre que j’entre à l’école avant l’âge de huit ans. J’en avais six. Pour me tenir compagnie, elle adopta une fillette d’un an mon aînée. C’était une orpheline, aux longues boucles rousses, au visage marqué de petite vérole, très vive et plus éveillée que moi. Mon oncle l’appelait Louis XIV, à cause de sa ressemblance avec le portrait qu’on trouve de ce monarque dans le dictionnaire et parce qu’il ne se rappelait jamais son nom. Elle s’appelait Dinah. Son plaisir consistait à m’enfermer avec elle dans le hangar ou dans une chambre et là, à se dévêtir. Je ne sus pas garder son secret et après deux ou trois corrections, elle fut renvoyée aux Enfants Trouvés.

Le renvoi de Dinah et la décision de ma tante de ne pas la remplacer donna à ma belle-mère une joie en apparence disproportionnée à l’importance de l’événement. C’est que ma tante Léonie avait de la fortune et que dans la famille on escomptait cet héritage. Pour moi, la perte de ma petite compagne seule importait. Après son départ, j’errai désormais en bordure des maisons