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rassure pas, au contraire, il ajoute à son effroi, car s’il voyait des flammes, d’autres les verraient, le danger serait connu, combattu sans qu’il ait à intervenir. Ne voyant rien, il ne croit pas le feu éteint, il voit une nécessité plus grande d’intervenir. Il prend à ce moment une conscience aiguë du temps, de la fuite du temps vers un irréparable qui en quelque sorte vaudrait mieux pour lui, pour son repos que cet état d’attente. Mais dans mon cas, cet irréparable était retardé à l’infini.

Ce qui est vraiment le plus extraordinaire, c’est que je ne faisais aucun progrès. Je n’osais m’ouvrir à personne de cette inquiétude que j’aurais été bien embarrassé de formuler et que je jugeais monstrueuse. J’avais peur d’effrayer mes parents, de perdre leur amour. Et un autre de mes tourments, c’est que je savais que jamais elle ne me quitterait, que jamais je ne m’y habituerais. Parfois, en lisant le récit d’un crime, je voyais dans le mal une solution. Si au moins j’avais un remords, mon inquiétude lui céderait le pas. Mais je discernais là un piège du Diable