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Tout était confus dans son esprit. Que sa décision de s’allier à Mayron ait été une erreur ne faisait aucun doute. Mais de quel raisonnement était-elle l’aboutissement ? Pourquoi avait-il cédé au besoin de dénoncer son œuvre, de prendre le contrepied des idées de sa jeunesse. Comment en était-il arrivé à ce détachement ? Durcissement naturel de l’âge ? dégoût des querelles médiocres ? crise religieuse provoquée par son amour pour Sylvie ? Il y avait de tout cela. Mais surtout, il avait pris conscience de la caducité sur le plan universel des revendications que jusque là il avait jugées essentielles. Il avait dépassé le plan où le nationalisme est TOUT pour accéder à ce palier où il n’est qu’un problème intégré aux autres.

La fin de cette aventure le laissait les mains vides. Tous les sacrifices qu’il avait consentis, tous ses efforts s’engouffraient dans le néant. Il ne lui restait que des dettes et des ennuis. Il devait recommencer à neuf, alors que les siens ne croyaient plus en lui et que lui-même se sentait ébranlé dans sa volonté.

Longtemps, il avait tendu vers l’indifférence qui lui paraissait le paroxysme de la personnalité ; l’ayant atteinte, il y découvrit une équivalence du désespoir. Mais est-ce bien ce