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des ventes et achats, et il ne se consommait pas un article, ni dans ses cuisines, ni dans ses écuries, ni dans ses appartements, dont il ne connût le prix. Il s’amusait quelquefois à demander à ses courtisans le prix des divers objets de consommation, et se complaisait à observer qu’il était servi à meilleur marché qu’eux.

Un jour que j’entrais dans son cabinet, il me dit d’un air joyeux qu’il venait de gagner sur ses dépenses 35,000 francs par an. Je lui demandai sur quoi portaient ces économies : « Sur le café », me répondit-il. « On prenait ici 155 tasses de café par jour, chaque tasse me coûtait 20 sous, ce qui faisait 56,575 francs par an (le sucre coûtait alors 4 francs et le café 5 francs la livre). J’ai supprimé le café et accordé 7 francs 6 deniers en indemnité. Je payerai 21,164 fr. et j’économiserai 35,000 fr. »

Napoléon était doué d’une mémoire extraordinaire, mais il avait surtout celle des chiffres et celle des noms. Les résultats des tableaux de situation qu’on lui présentait se gravaient dans