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aucune, et ensuite pour les lier plus particulièrement à son sort et les intéresser au maintien de ses conquêtes.

Je n’ai jamais surpris l’Empereur faire l’éloge d’aucun général, et souvent je l’ai entendu les critiquer vertement tantôt sur leur peu de talent, tantôt sur leur mauvaise conduite. Il a répété bien des fois en parlant des maréchaux : « Ces gens-là se croient nécessaires, et ils ne savent pas que j’ai cent généraux de division qui peuvent les remplacer. » Accoutumé à rapporter tout à lui, à ne voir que lui, à n’estimer que lui, Napoléon paralysait tout ce qui l’entourait. Il ne voulait pas d’autre gloire que la sienne. Il ne croyait du talent qu’à lui seul.

Voilà pourquoi, à la guerre comme au conseil, il accaparait tout, il s’attribuait tout. Les hommes n’étaient plus, à ses yeux, que des machines qu’il se croyait destiné à faire mouvoir, et ces hommes étaient, par cela seul, timides, irrésolus, presque indifférents. De là vient qu’il avait des succès partout où il était,