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la superstition a causés à l’espèce humaine ; et le genre humain oppressé sous vingt siècles de fanatisme, auroit, peut-être, déjà couronné le faîte de l’édifice des siences, si l’étude expérimentale de l’homme avoit pris la place de son étude métaphysique. Contemplez l’homme dans son enfance, vous le verrez entouré d’erreurs, nourri de préjugés, dégoûté des études exactes, et continuellement rappelé d’un monde qui le presse de tous côtés vers un monde chimérique : et, lorsque la raison parvient enfin à rompre ces premières entraves, que de peines, que d’efforts pour laver son ame de ces taches de superstition dont on l’avoit souillée !

L’étude expérimentale de l’homme, si elle eut été générale, eut prévenu cette dépravation de l’espèce humaine : le jeu des organes, l’action puissante des causes externes sur nos facultés morales, la similitude de notre construction physique avec celle du plus grand nombre des êtres de la nature, nous marquent assez nôtre place, et nous apprennent ce que nous devons penser de ces prérogatives que le délire d’un orgueil ignorant a données à l’espèce humaine. Il me suffira d’observer que, si les siècles écoulés nous ont conservé quelques idées saines sur la composition de notre être, sur ses rapports avec tous ceux qui l’avoisinent, sur les modifications de l’espèce humaine sous les divers climats, sur nos facultés morales., etc., c’est surtout aux médecins que nous devons de nous avoir transmis ce dépôt. On ne les a jamais vus consacrer dans leurs écrits les maximes de ces imaginations, à la fois délirantes et tyranniques. Ils ont eu la sagesse de se taire ou le courage de révéler des vérités qui, en fesant connoître à l’homme l’homme lui-même, le dégageoient du terrorisme des prêtres. Aussi, de