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et de charger notre sol des richesses de tous les climats ? Le voyageur qui, parvenu dans les murs de la fière Albion, n’aspireroit qu’à connoître les noms des tous les individus qu’elle renferme, est le tableau du botaniste purement nomenclateur.

Le Médecin ne peut donc pas s’élever à la dignité de son art, sans mener de front les connoissances qui intéressent essentiellement la société : il apprend à bien mériter à la fois de l’humanité qu’il soulage et des arts qu’il éclaire : et un gouvernement, capable de former le plan d’une éducation profitable à l’intérêt de tous, devroit en établir pour base l’étude des connoissances qui doivent nous occuper dans cette école.

En effet, celle de toutes les connoissances qui nous intéresse le plus, c’est la connoissance de nous même : semblable à l’artiste qui commence par apprendre à connoître les outils qui doivent devenir les compagnons de son industrie, avant de se hasarder dans des opérations difficiles, l’homme doit commencer par s’étudier soi-même, puisque ses organes sont les instrumens de tous ses travaux. Il seroit ridicule, il seroit honteux de s’oublier soi-même, pour ne s’occuper que de ce qui est hors de nous.

L’anatomie et la physiologie doivent donc être la base de l’éducation de l’homme. Et, si telle eût été la marche de l’éducation dans les siècles qui nous ont précédé, nous n’eussions jamais vu des imaginations déréglées, créer des mondes imaginaires, et substituer des phantômes à des réalités ; nous n’eussions jamais vu des hommes de génie se détourner de la route de l’expérience pour se jeter dans le labyrinthe des hypothèses. Nous n’aurions pas à gémir aujourd’hui sur les maux que