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l’échec du volapuk. Malheureusement, les absents ont souvent tort et ce pauvre volapuk n’est plus là pour se défendre. Je n’ai pas mission de prendre cette défense, mais je me ferai l’écho de personnalités compétentes en exposant le parallèle suivant.

En réalité, l’Espéranto n’est qu’une nouvelle édition revue, corrigée et améliorée — dit-on — du volapuk. Les inventeurs de ces langue se sont servis en grande partie des mêmes éléments, bien connus d’ailleurs de tous ceux qui se sont occupés de cette question. On peut les résumer ainsi :

Si vous désirez composer une langue artificielle, prenez une langue vivante, livrez-vous d’abord à une élagage vigoureux, enlevez-en tout ce qui vous semble inutile ou nuisible : irrégularité, exception, barbarisme, solécisme, néologisme, idiotisme, amphibologie… (voir page 29), supprimez le genre, les déclinaisons, les conjugaisons, les accents… réduisez la grammaire à sa plus simple expression, on doit pouvoir l’apprendre en une petite demi-heure, plus de syntaxe…, etc.

Mais, me direz-vous, que restera-t-il après ces suppressions ? Ne vous inquiétez pas ; moins il en restera mieux ce sera ; c’est là, paraît-il, l’idéal de la perfection.

Tout en désossant ainsi la malheureuse langue vivante, conservez-lui un certain nombre de ses radicaux, auxquels vous pourrez en ajouter d’autres à votre goût pris autant que possible dans d’autres langues ; saupoudrez ces radicaux d’affixes et de suffixes, pas trop, une trentaine suffisent ; n’oubliez pas le phonétisme absolu, etc.

C’est avec la plus grande partie de ces données qu’ont été construits le Volapuk et l’Espéranto, et aussi peut-être la langue bleue.

Il ne faudrait pas croire que l’opération que je viens de décrire dans ses grandes lignes soit une petite besogne. Des juges compétents s’accordent à reconnaître que les trois langues artificielles les plus récentes, Volapuk, Espéranto et Bolak, sont de véritables chefs-d’œuvre de travail, de patience, d’ingéniosité et d’érudition.

Il va sans dire que chaque inventeur imprime son œuvre un cachet particulier. Ainsi le Volapuk a pris comme type les idiomes slaves et germains, et l’Espéranto les néo-latins.