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JEAN TALON, INTENDANT

l’avoir signalé brièvement, Talon annonçait que M. de Salières et huit compagnies de son régiment allaient s’embarquer le 6 mai. Les huit dernières compagnies devaient partir environ huit jours après sur deux vaisseaux avec M. de Courcelle et l’intendant[1].

Ces lettres de Talon à Colbert, datées de La Rochelle, sont d’un spécial intérêt parce qu’elles nous le montrent à l’œuvre même avant son départ de France, et qu’il y manifeste cet esprit progressif et judicieux dont notre pays aura tant de preuves. Le 14 mai il informe le ministre qu’il a assisté à la revue de huit compagnies,

  1. — Arch. féd., Canada, corr. gén. II. — Quatre compagnies du régiment de Carignan-Salières étaient parties avec un premier vaisseau. (Journal des Jésuites, p. 432) Dans cette même lettre du 4 mai 1665, on voit reparaître un instant l’ex-intendant du Hainaut. « J’ai laissé entre les mains d’un de mes frères, dit-il, quelques plans des villes de Flandre dont j’ai eu l’honneur de vous parler. » Et ailleurs : « M’étant trouvé en Flandre entre quatre des principales têtes du pays, je connus par leur entretien que de toutes les entreprises que le roi fait en dehors de ses états, celle qui leur donne plus de jalousie est la prise de possession de la terre ferme de l’Amérique, (c’est-à-dire de Cayenne et de la région entre les Amazones et l’Orénoque), même des colonies que Sa Majesté y envoie, et ces quatre personnes ne purent s’empêcher de me faire connaître que les ministres d’Espagne craignent qu’à la mort de Philippe IV, refusant au roi les parties des Pays-Bas qu’ils connaissent lui être légitimement acquises, ils n’ouvrent la porte à l’invasion (c’est le terme dont ils se servent) que Sa Majesté pourra faire des parties de l’Amérique qu’ils occupent, qu’ils estiment l’âme de leur monarchie qui ne se soutient pas, comme la France, par la multitude de ses peuples, l’abondance de ses productions et la richesse de son commerce, toutes ses principales forces provenant des mines de ce pays ».