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JEAN TALON, INTENDANT

Mais, disait le mémoire, ils avaient fait révoquer ceux qui ne leur convenaient pas. Avaient-ils fait révoquer Champlain, mort en charge ? Ou M. de Montmagny, rappelé après douze ans, parce que la Cour avait décidé de ne plus laisser les gouverneurs aussi longtemps en fonctions ? Ou M. d’Ailleboust, nommé pour trois ans et qui fit tout son terme d’office ? Avaient-ils fait révoquer M. de Lauson, qui partit sans ordre du roi, avant l’expiration de son gouvernement ? N’était-ce pas M. d’Argenson lui-même qui avait demandé à M. de Lamoignon de lui faire choisir un successeur ? Et M. d’Avaugour n’avait-il pas été rappelé à cause de son conflit avec Mgr  de Laval sur la question de l’eau-de-vie ? Il était vraiment fâcheux que des affirmations aussi légères et aussi peu exactes se fussent glissées dans un mémoire portant la signature royale.

Quant à Mgr  de Laval, rien de plus étrange que d’entendre Louis XIV lui reprocher d’exercer une autorité excessive. C’était le roi lui-même qui lui avait conféré des pouvoirs politiques, qui lui avait ouvert les portes du Conseil Souverain et l’avait fait l’égal du gouverneur pour le choix des conseillers ! L’évêque de Pétrée avait-il abusé de ses pouvoirs ? Où en était la preuve ? Il avait simplement refusé de concourir dans les coups d’État de M. de Mésy.

Ni l’évêque, ni les Jésuites n’avaient jamais tenté de s’immiscer indûment dans le gouvernement temporel de la colonie. Administration de la justice, questions de tarifs et d’impôts, règlements de police, entreprises, expéditions, guerre et paix, dans aucune de ces matières ils n’avaient affiché la prétention de diriger et de dominer. Leur rôle avait toujours été celui de sujets