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JEAN TALON, INTENDANT

pourraient écouler ainsi plus facilement le surplus de leurs grains, et que l’ouverture de ce nouveau marché pour les produits agricoles engagerait beaucoup de gens à se livrer à l’agriculture. Mû par toutes ces considérations, le Conseil rendit un arrêt par lequel il était décrété qu’après l’établissement des brasseries on ne pourrait importer de l’ancienne France dans la nouvelle aucuns vins ni eau-de-vie sans avoir obtenu congé du roi, de celui qui aurait pouvoir de Sa Majesté ou du Conseil, à peine de cinq cents livres d’amende applicable par tiers aux seigneurs du pays, à l’Hôtel-Dieu et à celui qui aurait établi la première brasserie. Les permis d’importer, de la part du Conseil, ne pourraient excéder douze cents barriques de boissons alcooliques en tout, dont deux tiers de vin et un tiers d’eau-de-vie. Talon était prié de prendre les mesures nécessaires pour la construction et l’équipement d’une ou plusieurs brasseries. Les propriétaires de ces établissements devaient avoir pendant dix ans le privilège exclusif de faire de la bière pour le commerce. Le prix de cette boisson était fixé d’avance à vingt livres la barrique, et à six sous le pot, si l’orge était à trois livres le minot ou au-dessous ; et si l’orge se vendait plus cher le prix de la bière devait être augmenté en proportion, sur requête au Conseil. Cette mesure était inspirée à la fois par une idée morale et par une idée économique.

Dans le cours de l’automne de 1667, on agita fortement la question de former une compagnie des habitants du Canada pour faire le négoce à l’exclusion de tous autres. Le Conseil fut saisi d’un projet. Après en avoir entendu lecture, considérant que le pays y trouverait son avantage, il pria Talon d’écrire à la Cour pour faire