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ajoutées (προστιθεμένα) à l’alphabet primitif. Ces premières lettres sont, d’après Pline, Α, Β, Γ, Δ, Ε, Ι, Κ, Λ, Μ, Ν, Ο, Π, Ρ, Σ, Τ, Υ : les secondes sont, Θ, Ξ, Φ, Χ ; les troisièmes, Ζ, Η, Ψ, Ω. Remarquons que ces xvi caractères ont dû en effet être inventés avant les autres, parce qu’ils représentent les xvi sons élémentaires ou simples que peut former la bouche humaine, soit par intonation, soit par articulation. Les autres caractères, en sus de ceux-là, dans les alphabets des différens peuples, expriment, soit des nuances de ces sons principaux, soit la réunion de plusieurs articulations en une seule ; de manière que chacun d’eux peut être plus ou moins exactement décomposé dans les sons primitifs qu’il contient. Ainsi, le fait que l’alphabet phénicien et grec n’a d’abord contenu que ces xvi caractères, n’est pas seulement établi sur des indications historiques précises, il est de plus conforme à la nature, et l’on peut croire que tous les alphabets ont été primitivement formés de ce nombre de caractères, exprimant les sons de l’alphabet phénico-grec.

Il est facile de voir maintenant ce que Clément d’Alexandrie a dû entendre par les premières lettres de l’alphabet : il a voulu dire que, dans ce genre d’hiéroglyphes (B, b, a′), on exprimait les objets au moyen des caractères hiéroglyphiques représentant les sons de l’alphabet primitif.

Si je jette maintenant les yeux sur le tableau des hiéroglyphes phonétiques, qui accompagne votre lettre à M. Dacier, j’y trouve des signes correspondant à xix caractères grecs ; le Ζ, le Θ, le Ψ, le Χ, n’y existent pas ; mais peut-être trouverez-vous cette dernière lettre plus tard. Il y a, dans les autres, de doubles emplois. Par exemple, les signes qui correspondent au Ξ sont formés de la réunion des signes du Κ et du Σ, ce qui signifie que Ξ n’existe pas plus dans l’alphabet des hiéroglyphes phonétiques que dans l’alphabet grec primitif.

Même observation à faire sur les caractères qui répondent à l’Η ; ils sont les mêmes que ceux de l’iota ; le signe du Φ est le même que celui du Π ; enfin le signe de l’Ω est le même que celui de l’Ο. Il n’y a donc, au fond, que xvi caractères de l’alphabet grec qui trouvent une évaluation correspondante dans les hiéroglyphes phonétiques dont vous avez formé le tableau ; or, il est très-remarquable que ces xvi

    que le mot Φοινίκεια n’est point ici un adjectif ; c’est un nom appellatif. Ce mot est souvent employé substantivement pour désigner les lettres de l’alphabet, comme dans une inscription de Téos, où nous lisons Φοινικηϊα ἐκκόψει, pour γράμματα ou στοιχεῖα ἐκκ. ; sur quoi l’on peut voir la note érudite de Chishull (Antiq. asiat., pag. 101).