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écrit, et ceux qui le lisent veulent avoir la gloire de l’avoir lu ; et moi, qui écris ceci, j’ai peut-être cette envie, et peut-être que ceux qui le liront l’auront aussi. » (Pensées de Pascal, ch. XXIV.)

On ne trouve jamais de ces confessions dans Chamfort. Les vices qu’il censure, les ridicules qu’il relève, il ne les a jamais vus que dans les autres. C’est moins l’amour de la vérité qui l’a conduit dans ses recherches utiles, que la haine des choses et des personnes qui ont offensé ses regards. Il a plus écrit par humeur que par philosophie.

« C’est la plaisanterie, dit Chamfort, qui doit faire justice de tous les travers des hommes et de la société. C’est par elle qu’on évite de se compromettre, c’est par elle qu’on met tout en place (il faut : à sa place), sans sortir de la sienne. C’est elle qui atteste notre supériorité sur les choses et les personnes dont nous nous moquons, sans que les personnes puissent s’en offenser, à moins qu’elles ne manquent de gaieté ou de mœurs. La réputation de savoir bien manier cette arme donne à l’homme d’un rang inférieur, dans le monde et dans la meilleure compagnie, cette sorte déconsidération que les militaires ont pour ceux qui manient supérieurement l’épée.