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faim, & que ceux qui les avaient prises pour maîtresses s’en étaient fort bien trouvés. Cela revient assez à ce que j’ai ouï dire à Diderot, qu’un homme de lettres sensé pouvait être l’amant d’une femme qui fait un livre, mais ne devait être le mari que de celle qui sait faire une chemise. Il y a mieux que tout cela, c’est de n’être ni l’amant de celle qui fait un livre, ni le mari d’aucune.

J’espère qu’un jour, disait M…, au sortir de l’Assemblée nationale présidée par un Juif, j’assisterai au mariage d’un Catholique séparé par divorce de sa première femme Luthérienne, & épousant une jeune Anabaptiste ; qu’ensuite nous irons dîner chez le Curé, qui nous présentera sa femme, jeune personne de la religion Anglicane, qu’il aura lui-même épousée en secondes noces, étant veuf d’une Calviniste.

Ce n’est pas, me disait M. de M…, un homme très-vulgaire, que celui qui dit à la Fortune : je ne veux de toi qu’à telle condition ; tu subiras le joug que je veux t’imposer ; & qui dit à la Gloire : tu n’es qu’une fille à qui je veux bien faire quelques caresses, mais que je repousserai si tu en risques avec moi de trop familières & qui ne me conviennent pas. C’était lui-même qu’il peignait, & tel est en effet son caractère.