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CHAPITRE VII.

des savans et des gens de lettres.
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IL y a une certaine énergie ardente, mère ou compagne nécessaire de telle espèce de talens, laquelle pour l’ordinaire condamne ceux qui les possèdent au malheur, non pas d’être sans morale, de n’avoir pas de très-beaux mouvemens, mais de se livrer fréquemment à des écarts qui supposeraient l’absence de toute morale. C’est une apreté dévorante dont ils ne sont pas maîtres & qui les rend très-odieux. On s’afflige, en songeant que Pope & Swift en Angleterre, Voltaire & Rousseau en France, jugés non par la haine, non par la jalousie, mais par l’équité, par la bienveillance, sur la foi des faits attestés ou avoués par leurs amis & par leurs admirateurs, seraient atteints & convaincus d’actions très-condamnables, de sentimens quelquefois très-pervers. O Altitudo ![1]

  1. Nouveau Testament (Vulgate), Épître aux Romains, Rm 11,33 : O altitudo divitiarum sapientiae, et scientias Dei (Ô profondeur des trésors de la sagesse et de la science de Dieu). (Note wiki)