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comme Bacon disait qu’il faut recommencer l’entendement humain.

— Diminuez les maux du peuple, vous diminuez sa férocité ; comme vous guérissez ses maladies avec du bouillon.

— J’observe que les hommes les plus extraordinaires et qui ont fait des révolutions, lesquelles semblent être le produit de leur seul génie, ont été secondés par les circonstances les plus favorables, et par l’esprit de leur temps. On sait toutes les tentatives faites avant le grand voyage de Vasco de Gama aux Indes occidentales. On n’ignore pas que plusieurs navigateurs étaient persuadés qu’il y avait de grandes îles, et sans doute un continent à l’ouest, avant que Colomb l’eût découvert ; et il avait lui-même entre les mains les papiers d’un célèbre pilote avec qui il avait été en liaison. Philippe avait tout préparé pour la guerre de Perse, avant sa mort. Plusieurs sectes d’hérétiques, déchaînées contre les abus de la communion romaine, précédèrent Luther et Calvin, et même Vicleff.

— On croit communément que Pierre-le-Grand se réveilla un jour avec l’idée de tout créer en Russie ; M. de Voltaire avoue lui-même que son père Alexis forma le dessein d’y transporter les arts. Il y a, dans tout, une maturité qu’il faut attendre. Heureux l’homme qui arrive dans le moment de cette maturité !

— Les pauvres sont les nègres de l’Europe.