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— Celui qui déguise la tyrannie, la protection ou même les bienfaits, sous l’air et le nom de l’amitié, me rappelle ce prêtre scélérat qui empoisonnait dans une hostie.

— Il y a peu de bienfaiteurs qui ne disent comme Satan : Si cadens adoraveris me.

— La pauvreté met le crime au rabais.

— Les stoïciens sont des espèces d’inspirés, qui portent dans la morale l’exaltation et l’enthousiasme poétiques.

— S’il était possible qu’une personne sans esprit pût sentir la grâce, la finesse, l’étendue et les différentes qualités de l’esprit d’autrui, et montrer qu’elle le sent, la société d’une telle personne, quand même elle ne produirait rien d’elle-même, serait encore très-recherchée. Même résultat de la même supposition, à l’égard des qualités de l’âme.

— En voyant ou en éprouvant les peines attachées aux sentimens extrêmes, en amour, en amitié, soit par la mort de ce qu’on aime, soit par les accidens de la vie, on est tenté de croire que la dissipation et la frivolité ne sont pas de si grandes sottises, et que la vie ne vaut guère que ce qu’en font les gens du monde.

— Dans de certaines amitiés passionnées, on a le bonheur des passions, et l’aveu de la raison par-dessus le marché.

— L’amitié extrême et délicate est souvent blessée du repli d’une rose.