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ce que cette opération de classement, de systématisation fût faite et parfaite. Enfin il put prononcer cette fière parole, en homme qui a définitivement pris conscience de lui-même : « Comme artiste et comme homme, je chemine vers un monde nouveau. » Aussitôt la noble inconscience de la production artistique reprend ses droits : deux mois après l’envoi du manuscrit de la Communication, apparaît déjà le germe de ce drame cosmique, l’Anneau du Nibelung. « Avec Siegfried, j’ai de grands projets en tête : trois drames, avec prologue, en trois actes. » (Lettre à Uhlig du 12 octobre 1851.) Dès lors, le maître, en dépit de sa santé constamment chancelante, fait preuve d’une puissance productrice incomparable : le plan de la tétralogie est achevé en novembre 1851, le poème en décembre 1852 ; un an après, la partition du Rheingold est presque terminée ; la Valkyrie prend deux ans (la dernière portée de la partition était écrite au printemps de 1856) ; puis il attaque aussitôt Siegfried, et, en juin 1857, le premier acte et le second sont déjà entièrement esquissés. Puis la production, sans s’arrêter, se tourne ailleurs ; de l’été de 1857 à celui de 1859, Wagner écrit, poème et musique, Tristan et Iseult, la première de ses œuvres qui ait été terminée dans cette « période du vouloir artistique conscient. » Le maître ne croyait nullement, ainsi, sortir de la sphère qu’embrasse l’Anneau ; il voyait au contraire dans Tristan « un complément dramatique du grand mythe des Nibelungen, dont la signification comprend tout un monde ». Cependant son œil intérieur avait vu se dresser devant lui une autre figure, qui, en raison de a la connexité de tous les vrais mythes », se trouvait reliée aux drames des Nibelungen et de Tristan par mille affinités diverses : la figure de Parsifal. Je sais