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d’être frappé de la place qu’y occupe la linguistique ; et, en fait, celle-ci resta, jusqu’à sa mort, son étude favorite[1].

Mais c’est au contact de l’éducation si particulière, reçue par lui, dès le berceau, dans son entourage, que l’instruction qu’il reçut à l’école prend une signification très intéressante. Nous l’avons dit plus haut, l’air même qu’il respirait était l’atmosphère du théâtre. Ce furent donc précisément les auteurs dramatiques, Eschyle et Sophocle, qui exercèrent la plus grande fascination sur le jeune garçon ; et, à l’âge de 13 ans, il se mit à apprendre l’anglais, tout seul, afin de pouvoir lire Shakespeare dans l’original. Sophocle et Shakespeare, cet enfant qui grandissait à la lueur des feux de la rampe les comprit d’emblée, sinon dans leur sens le plus profond, au moins peut-être dans leur sens le plus vrai : non comme des auteurs qui font l’ornement de la littérature, mais comme des dramaturges, comme des poètes auxquels l’exécution scénique peut, seule, donner leur vraie et leur complète valeur. Et cet auguste commerce dut contribuer, de bonne heure, à affiner, à idéaliser ses impressions théâtrales, à lui faire pressentir l’inépuisable richesse de la forme dramatique, et à quelles hauteurs elle peut aspirer et atteindre.

Un coup d’œil jeté sur ces vingt premières années nous montre combien le génie, ce don royal qu’une fée bienfaisante avait déposé dans le berceau de Richard Wagner, trouva un milieu favorable à sa lente floraison : la fréquentation journalière du théâtre, l’impression durable que lui laissa la direction de Carl Maria

  1. Il est bon, me semble-t-il, de signaler le fait à ceux qui, au nom de connaissances spéciales fort médiocres, prétendent regarder de haut la langue des poèmes de Wagner.