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dié à la fin de 1873, à quatre mille libraires et marchands de musique allemands ; pas un seul de ces quatre mille ne fit la moindre attention à cet envoi ! À Gœttingen seulement, un petit nombre d’étudiants souscrivèrent quelques thalers ! En même temps, les sociétés plus haut mentionnées s’étaient adressées à 81 théâtres royaux et municipaux, avec la demande de donner des représentations au bénéfice de l’entreprise de Bayreuth, demande, certes, bien légitime, puisque ces théâtres avaient déjà tiré des sommes énormes de la représentation des œuvres du maître, et que la plupart n’avaient rétribué celui-ci que par une misérable somme de 20 à 30 louis d’or, payée une fois pour toutes ! Eh ! bien, de ces 81 théâtres, 78 ne répondirent pas du tout, et les trois autres répondirent par un refus ! Et qu’on ne se figure pas que les gens compétents ne tinssent pas pour viable l’Anneau du Nibelung, et que leur attitude négative fût le résultat de ce point de vue tout artistique ; pas le moins du monde ! Une société, la Wagneriana, se fonda en 1873, à Berlin, et offrit au maître un million, s’il consentait à transporter les Festspiele à Berlin ; 220.000 thalers, plus de deux fois ce qu’en deux ans sa laborieuse collecte avait produit pour Bayreuth, avaient été souscrits en si peu de temps que le succès ne pouvait être douteux, si rien au monde eût pu induire le maître à dévier de la ligne qu’il s’était tracée, celle de l’art pur et absolument désintéressé. Londres, Chicago firent des offres tout aussi tentantes. Combien noblement idéale resta sa détermination, c’est ce que nous montre une lettre écrite dans ce même hiver de 1873 ; il y dit : « Il s’agit davantage du réveil des forces latentes dans l’âme et dans la vie allemandes que de la réussite de ma propre entreprise. » En janvier 1874, Wagner dut fina-