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table espérance ». Voilà, certes, un brusque et surprenant détour, qui n’eût surpris personne davantage que l’homme qui appelait l’espérance « la folie du cœur » ; ce qui, sans doute, ne prouve rien, puisque Kant lui-même n’eût pas été capable de reconnaître son continuateur en Schopenhauer. On peut dire que celui-ci, prenant comme tremplin « l’idéalisme critique » de Kant, a fait un vrai saut périlleux, pour arriver à voir, dans sa Volonté, la chose en soi. Et Wagner a fait, lui aussi, un saut qui ne le cède point en audace à celui-là. Avec une infaillible sagacité il a reconnu que la négation de la volonté de vivre, quelles que soient les raisons qu’elle se donne, « se caractérise » toujours comme la suprême énergie de la volonté. Il en conclut que quiconque se rend pleinement compte de la déchéance, et possède en même temps cette plus haute énergie de la volonté, a dans la main tout ce qu’il faut pour une régénération : il connaît le mal et il est maître du salut. C’est de là que sort cette « foi à une régénération possible », cette pénétration de « la toute-puissance de la volonté » et c’est ainsi que s’explique cette étrange parole : « La certitude de la victoire de la volonté est le fruit de la conscience de la déchéance. »

Dans tout ce qui précède, il ne faut voir, naturellement, que des indications ; on ne saurait, en bonne justice, demander plus à une exposition sommaire et générale. En notant le rapport organique qui unit le pessimisme de Schopenhauer à l’optimisme wagnérien au point de vue de la régénération, j’ai rappelé au lecteur ce qu’il y a, selon moi, de plus intéressant et de plus significatif dans la pensée philosophique de Wagner.

Et sans doute, qui voudrait se contenter, dans la doc-