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Tel homme qui dans un temps se serait laissé emporter jusqu’au régicide, a fini son existence en renforcé réactionnaire, en « repu », selon l’expression consacrée.

L’attitude d’Alibaud, que j’avais rencontré plusieurs fois avec des amis dans un petit café de la rue Mazarine, me rappelle une anecdote toute personnelle.

Le lendemain du jour où le jeune régicide fut arrêté, vers trois heures de l’après-midi, une estafette, un garde municipal à cheval, s’arrêta devant la petite maison de mon père, rue des Boulangers-Saint-Victor, et me demanda. J’étais absent.

Grand émoi dans la maison. Par un papier venant du parquet, on me requérait pour paraître au Palais de Justice, dans le cabinet du juge d’instruction.

Quand je revins, quelques minutes après la visite du garde municipal, mon père m’interpella, du plus loin qu’il m’aperçut dans la cour :

« Malheureux enfant ! qu’as-tu fait ? » s’écria-t-il, moitié avec une colère éclatante, moitié avec une sollicitude paternelle.

Sa dame de compagnie et sa domestique semblaient partager ses craintes à mon endroit.

Elles me regardaient fixement, silencieuse-