Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/96

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Tonne. À Sa voix, qui sait, comme la voix des dieux,
En homme transformer l’argile,
La terre tressaillit. Elle quitta son deuil.
Le genre humain d’espérance et d’orgueil
Sourit. Les noirs donjons s’écroulèrent d’eux-mêmes.
Jusque sur les trônes lointains
Les tyrans ébranlés, en hâte à leurs fronts blêmes,
Pour retenir leurs tremblants diadèmes,
Portèrent leurs royales mains.
À son souffle de feu, soudain de nos campagnes
S’écoulent les soldats épars
Comme les neiges des montagnes,
Et le fer ennemi tourné vers nos remparts,
Comme aux rayons lancés du centre ardent d’un verre,
Tout à coup à nos yeux fondu de toutes parts,
Fuit et s’échappe sous la terre.


XIII



Il renaît citoyen ; en moisson de soldats
Se résout la glèbe aguerrie.
Cérès même et sa faux s’arment pour les combats.
Sur tous ses fils jurant d’affronter le trépas
Appuyée au loin, la patrie
Brave les rois jaloux, le transfuge imposteur,
Des paladins le fer gladiateur,
Des Zoïles verbeux l’hypocrite délire.
Salut, peuple français ! ma main
Tresse pour toi les fleurs que fait naître la lyre.
Reprends tes droits, rentre dans ton empire.
Par toi sous le niveau divin