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Quand je lui répétais que la liberté mâle
Des arts est le génie heureux ;
Que nul talent n’est fils de la faveur royale ;
Qu’un pays libre est leur terre natale.
Là, sous un soleil généreux,
Ces arts, fleurs de la vie, et délices du monde,
Forts, à leur croissance livrés,
Atteignent leur grandeur féconde.
La palette offre l’âme aux regards enivrés.
Les antres de Paros de dieux peuplent la terre.
L’airain coule et respire. En portiques sacrés
S’élancent le marbre et la pierre.


II



Toi-même, belle vierge à la touchante voix,
Nymphe ailée, aimable sirène,
Ta langue s’amollit dans les palais des rois,
Ta hauteur se rabaisse et d’enfantines lois
Oppriment ta marche incertaine ;
Ton feu n’est que lueur, ta beauté n’est que fard.
La liberté du génie et de l’art

    même dans la forme des strophes. Il voudrait bien n’être pas resté entièrement au-dessous de ce noble genre lyrique, que M. Le Brun a fait revivre dans toute sa grandeur et sa majesté. Il n’oublie pas de compter, parmi les études qui lui ont été le plus utiles pour développer en lui le peu d’instinct poétique que la nature a pu lui donner, la lecture souvent répétée des odes et des autres sublimes poésies que M. Le Brun lui a communiquées autrefois, et dont le recueil, glorieux pour notre langue et pour notre siècle, est trop longtemps envié aux regards du public. Il le prie d’agréer ses très-sincères compliments.

    « Ce mercredi 2 mars 1791.