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De chaume et de filets armer les arbrisseaux,
Et soulager leurs troncs des blanches inutiles,
Pour leur faire adopter des rameaux plus fertiles.
Mais alors que du haut des célestes déserts
L’astre de la nature embrasera les airs,
Tantôt dans ma maison plus commode que belle,
Tantôt sur le tapis dont se pare Cybèle,
Où des feux du midi le platane vainqueur
Entretient sous son ombre une épaisse fraîcheur.
J’aurai quelques amis, soutiens de ma vieillesse.
Le plaisir, qui n’est plus celui de ma jeunesse,
Est encor cependant le dieu de mes banquets :
L’œillet, la tubéreuse y brillent en bouquets.
L’automne sur ses pas y conduit l’abondance
Et la douce gaîté, mère de l’indulgence ;
Et, tel que dans l’Olympe à la table des dieux,
De pampres et de fruits et de fleurs radieux,
Donne à tous les objets offerts à son passage
Ce ris pur et serein qui luit sur son visage.


L’idée de ce long fragment m’a été fournie par un beau morceau de Properce, livre III, élégie 3. Mais je ne me suis point asservi à le copier. Je l’ai étendu ; je l’ai souvent abandonné pour y mêler, selon ma coutume, des morceaux de Virgile et d’Horace et d’Ovide, et tout ce qui me tombait sous la main, et souvent aussi pour ne suivre que moi. Voici comme il commence :

Me juvat in prima coluissc Helicona juventâ,
Musarumque choris implicuissc manus,

Il me semble qu’il n’est guère possible de traduire autrement ni mieux que je ne l’ai fait ce second vers, qui est charmant. Les anciens regardaient la danse non-seulement