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Mais la Révolution vint ; dix années, fin de l’époque, s’écoulèrent brusquement avec ce qu’elles promettaient, et abîmèrent les projets ou les hommes ; les trois Hermès manquèrent : la poésie du xviiie siècle n’eut pas son Buffon. Delille ne fit que rimer gentiment les Trois Règnes.

Toutes les notes et tous les papiers d’André Chénier, relatifs à son Hermès, sont marqués en marge d’un delta ; un chiffre, ou l’une des trois premières lettres de l’alphabet grec, indique celui des trois chants auquel se rapporte la note ou le fragment. Le poème devait avoir trois chants, à ce qu’il semble : le premier sur l’origine de la terre, la formation des animaux, de l’homme ; le second sur l’homme en particulier, le mécanisme de ses sens et de son intelligence, ses erreurs depuis l’état sauvage jusqu’à la naissance des sociétés, l’origine des religions ; le troisième sur la société politique, la constitution de la morale et l’invention des sciences. Le tout devait se clore par un exposé du système du monde selon la science la plus avancée.

Voici quelques notes qui se rapportent au projet du premier chant et le caractérisent :

« Il faut magnifiquement représenter la terre sous l’emblème métaphorique d’un grand animal qui vit, se meut et est sujet à des changements, des révolutions, des dérangements dans la circulation de son sang. »

« Il faut finir le chant Ier par une magnifique description de toutes les espèces animales et végétals naissant ; et, au printemps, la terre prœgnans ; et,