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Non, si Gnosse jamais vit sa reine inquiète
Se soumettre à l’orgueil du taureau de la Crète,
Et son fils monstrueux, son opprobre éternel,
Garder la voix farouche et le front paternel.

Les dieux pour se venger envoient quelquefois la folie.

C’est ainsi qu’autrefois, dans leurs délires vains,
Courant au pâturage et fuyant les humains,
Les filles de Prœtus, vagabondes compagnes,
De faux mugissements remplirent les campagnes.
L’aspect du soc leur fit chercher les bois profonds,
Tremblantes que le joug ne menaçât leurs fronts ;
Et leur main crut sentir, peureuse et mensongère.
Se dresser sur leur tête une armure étrangère.


LXII[1]


Là, du sage Minos cette fille si belle,
Le fil en main, formait une danse nouvelle,
Quand du grand Labyrinthe un jeune séducteur
Eut vaincu, par ses soins, l’inextricable erreur.
Le blond Thésée admire à sa brillante fête
Et les vierges d’Athène et les vierges de Crète.
Toutes, près d’Ariadne, en des détours légers,
Errent, du noir palais retraçant les dangers ;
Et leurs pas tortueux d’un confus labyrinthe,
Feignent de parcourir la ténébreuse enceinte.

  1. Éd. G. de Chénier.