Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/196

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Agitez son sommeil de lugubres images,
Montrez-lui, montrez-lui, sur de lointains rivages,
Seul, son nom à la bouche, et pâle et furieux,
Ce malheureux qui meurt en attestant les dieux !
Qui crie et son sang bouillonne, etc......
Nourrice d’Apollon, etc...........
Mer vaste ................
...... Et tes flots qui brisent les vaisseaux
Sont, auprès de mon cœur, et calmes et tranquilles.

Vient ensuite ce morceau :[1]

Triste vieillard, depuis que pour tes cheveux blancs
Il n’est plus de soutien de tes jours chancelants,
Que ton fils orphelin n’est plus à son vieux père,
Renfermé sous ton toit et fuyant la lumière,
Un sombre ennui t’opprime et dévore ton sein.
Sur ton siège de hêtre, ouvrage de ma main,
Sourd à tes serviteurs, à tes amis eux-même,
Le front baissé, l’œil sec et le visage blême,
Tout le jour en silence à ton foyer assis,
Tu restes pour attendre ou la mort ou ton fils.
Et toi, toi, que fais-tu, seule et désespérée,
De ton faon dans les fers lionne séparée ?
J’entends ton abandon lugubre et gémissant,
Sous tes mains en fureur ton sein retentissant ;
Ton deuil pâle, éploré, promené par la ville,
Tes cris, tes longs sanglots remplissent toute l’île.
Les citoyens de loin reconnaissent tes pleurs.
« La voici, disent-ils, la femme de douleurs ! »

  1. Ce fragment avait paru dans l’édition de 1833, jusqu’à : Elle a perdu son fils. Il avait été placé dans les Dernières poésies.