Page:Cellini, Oeuvres completes, trad leclanché, 1847.djvu/72

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
62
MÉMOIRES DE BENVENUTO CELLINI

long ma querelle avec l’évêque de Salamanque. Il se tourna ensuite vers un de ses officiers, et il lui enjoignit d’avoir soin que j’eusse toujours de l’ouvrage pour le palais.

Le cardinal Cibo m’envoya chercher, et, après de nombreux compliments, il me donna à faire un vase plus grand que celui de l’évêque de Salamanque. Je fus également employé par le cardinal Cornaro et d’autres cardinaux, surtout par Ridolfi et Salviati. De toutes parts les commandes m’arrivaient : de sorte que je gagnai beaucoup d’argent.

Madonna Porzia me conseilla d’ouvrir une boutique à mon compte. Je suivis cet avis, et cette gracieuse et excellente femme ne cessa de me confier quelque travail fort lucratif. Si j’ai montré que je n’étais point un homme dépourvu de talent, c’est presque à elle seule que j’en suis redevable.

Je me liai intimement avec le signor Gabriello Ceserino, gonfalonier de Rome. Je fis pour lui maints ouvrages, entre autres, un qui est remarquable. C’était une de ces grandes médailles d’or que l’on portait sur le chapeau ; elle représentait Léda avec son cygne. Le signor Gabriello, enchanté de mon travail, me dit qu’il voulait le faire estimer pour me le payer le juste prix. Comme ma médaille était exécutée avec un soin extraordinaire, les connaisseurs l’évaluèrent bien au delà de ce qu’il imaginait. Toutefois elle restait entre ses mains, et je ne recevais rien pour prix de mon travail. Bref, il en fut pour cette médaille comme pour le vase de l’évêque de Salamanque. Mais, afin que des choses de ce genre ne m’empêchent pas de raconter des faits plus importants, je ne m’y arrêterai point davantage.