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ceci tuera cela !

un hangar fermé de trois côtés et que tout menuisier bien dirigé saura transformer en un gymnase rudimentaire. Le matériel exigé pour un grand nombre de sports est des plus simples, chacun devant bien entendu posséder les vêtements nécessaires ; ces vêtements deviennent de plus en plus embryonnaires d’ailleurs à mesure que se répand l’habitude si salutaire de travailler la peau nue. L’exercice le plus compliqué à cet égard est l’escrime. Pourtant, une demi-douzaine d’armes et quatre masques suffiraient à la mise en train d’une bonne douzaine d’escrimeurs.

La question de l’instructeur apparaît plus délicate. On ne saurait improviser l’instruction, car si l’homme se perfectionne lui-même en enseignant, ce n’est pourtant qu’à condition d’avoir passé par quelque apprentissage préalable. Le professeur, oui ; mais le camarade promu au rang de moniteur ?… Chose étrange, on a essayé de l’enseignement mutuel en bien des cas où il constituait une innovation redoutable et vouée à l’insuccès et on a négligé d’y recourir sur le terrain où il semble le plus propre à rendre des services, celui de la culture physique car là le désir d’apprendre peut à la rigueur tenir lieu de savoir.

Hérésie, hérésie ! vont s’écrier les nombreux adeptes de l’« éducation scientifique ». Laissons clamer. Les théories sont belles mais, en ce temps-ci, il n’y a que les réalisations qui valent.

Je pense que parmi les personnes qui ont bien voulu me suivre jusqu’à ce point, il en est beaucoup qui trouveront inutile d’aller au-delà. Ce trépied leur paraîtra suffisant, le chant choral, le bain-douche, l’exercice musculaire, voilà qui s’accorde et se complète ; voilà de quoi constituer d’honnêtes réunions, un centre excellent de perfectionnement humain. À quoi bon ouvrir une porte sur les espaces indéfinis de la culture mentale ? On enseignait dans le gymnase grec ?… C’est possible, encore que nous ne sachions pas à quel degré cette pratique s’est généralisée. En tous cas, l’enseignement qu’on y donnait ne s’étendait guère. Des matières à envisager dont disposait l’antiquité, on en avait vite fait le tour. Nous autres au contraire, nous sommes en face de matières sans cesse accrues. Comment faire un choix dans cette richesse, si grande déjà qu’elle en devient pesante et que le classement même s’en opère avec difficulté ?

Ces objections sont justes. Mais elles ne me convainquent pas. Je persiste à croire, le principe de l’enseignement indispensable à l’équilibre du gymnase antique auquel nous cherchons à emprunter de nouveau ses moyens d’action. Et cet enseignement, je