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et d’avoir été le chef-lieu, le centre, le mobile de la liberté de penser.

Un seul des convives n’avait point pris de part à toute la joie de cette conversation, et avait même laissé tomber tout doucement quelques plaisanteries sur notre bel enthousiasme : c’était Cazotte, homme aimable et original, mais malheureusement infatué des rêveries des illuminés. Son héroïsme l’a depuis rendu à jamais illustre.

Il prend la parole, et du ton le plus sérieux : « Messieurs, dit-il, soyez satisfaits ; vous verrez tous cette grande et sublime révolution que vous désirez tant. Vous savez que je suis un peu prophète, je vous répète, vous la verrez. »

On lui répond par le refrain connu : « Faut pas être grand sorcier pour ça. — Soit, mais peut-être faut-il l’être un peu plus pour ce qui me reste à vous dire. Savez-vous ce qui arrivera de cette révolution, ce qui en arrivera pour tous tant que vous êtes ici, et ce qui en sera la suite immédiate, l’effet bien prouvé, la conséquence bien reconnue ?

— Ah ! voyons, dit Condorcet avec son air sournois et niais ; un philosophe n’est pas fâché de rencontrer un prophète.

Vous, monsieur de Condorcet, vous expirerez