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en le jettant dans le Lac, faites vôtre effet. Et lors s’allumant de luy même, cette Fléche produiſit un grand feu, qui conſomma dans un moment toutes les eaux : il demeura vif & clair en élevant ſes flammes juſqu’au Ciel.

Le Prince de Sabée fut deſeſperé de la ſottiſe qu’il avoit faite, d’avoir abandonné ſa bonne Fléche : ainſi d’ordinaire on ne reconnoît les fautes que l’on fait que lors qu’on en ſent le préjudice. Il demeura les bras croyſez, à conſiderer l’impetuoſité de ces flammes, & il étoit dans une triſteſſe profonde.

Veux tu embraſer tout l’univers, dit-il, enfin Démon cruel ? Voilà de tes tours ; aprés les biens que tu m’as laiſſé goûter, tu m’en fais trouver la perte inſupportable. Tu changes ſuivant ta nature, tu m’abandonnes, & tu tournes à mon dommage les mêmes faveurs que tu m’avois faites.

Le jeune Prince ſe tut aprés ces mots, & ſe mit à penſer avec une grande application de quelle ſorte il pourroit ſurmonter ſon malheur. Enfin il ſe ſouvint qu’il ne vivoit que dans les flammes depuis qu’il aimoit Lantine, & qu’un