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le trône de l’Amour, ou plûtôt elle n’avoit pas un regard qui n’eût un Amour en particulier. Le deſir de plaire étoit auſſi le plus fort de tous ſes deſirs : de là vint qu’elle prit des manieres coquettes, & qu’elle devint coquette. Tout aimoit autour d’elle, & tout eſperoit d’être aimé.

Le Seigneur du Roc affreux ſe mit ſur les rangs comme les autres. C’étoit un Enchanteur qui voulut employer la force de ſon art pour ſe rendre poſſeſſeur d’une ſi charmante perſonne. Il ſe lia, pour réüſſir dans ſes deſſeins, avec la Fée Abſoluë, qui avoit un grand pouvoir ſur la Princeſſe de l’Arabie heureuſe : il la ravit, & la tint un temps conſiderable dans une eſpece de captivité. Ses agrémens & ſa douceur l’obligerent à luy rendre ſa liberté. Elle revit ſes peuples, & ſa preſence ramena les Fêtes & les Jeux.

Ce fut dans ce temps que le jeune Prince de Sabée vit la belle Lantine : la voir & l’aimer furent la même choſe. Mais qu’il trouva ſon cœur changé ! Ce n’étoit plus ce cœur volage ſi penetré de tant de traits differens, & ſi capable de prendre l’impreſſion de toute ſorte d’ob-