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les quatre fils aymon

Mais bien sachies de voir, ne vos en quier mentir,
17270Se Grifones passast por me[s] neveus laidir,[1]
Ne me p[e]üsse pas por nule rien tenir[2]
Ne lor venisse aidier, s’i les vausist honir.
Car ge sai bien de voir, si com poes veïr,
Por mes neveus greveir que ge voi là seïr,
17275Fist il armer ses homes, ce fu tos son dessir. »
« Par Dex, dist Charlemaignes, ce ne puet avenir.
Qui hui sera vaincus, ge lo ferai honir ;
Ja nel garra lignages que net face morir. »
« Sire, ce dist Richars, molt me vient à plaisir
17280Et loiaument vos di, ge nel vos doi taisir,
Que en nule maniere ne porroie soffrir
Q’an les menast par tort por mon cors maubaillir. »
« Par Dex, dist l’empereres, bien lo puet l’an veïr.
Ja les metron ensamble que q’an doie avenir. »

17285Or fu li rois [en l’isle] il et sa gent de France.[3]
Il vint au fil Forcon, par aïr s’i avance :
« Seignor, que faites vos ? trop faites delaiance.
Jures vos serement, veoir voil la puissance. »
« Volentiers, dist li terres, puis qu’est vostre plaissance.
17290Mort sont li fil Renaut, s’il ne font conoissance,
Lor pere ocist lo nostre sans faire deffiance. »[4]
Adonc parla Torpins, n’i fist mie [taisance] :[5]
« Seignor, venes as sains là où est no creance.
Jurer le vos covient, car tex est l’ordenance. »

  1. 17270 L me.
  2. 17271 L pusse.
  3. 17285 L les l’ile. P Or tu Renaus sus l’ille, il et li rois de France.
  4. 17291 Sans le défier au préalable. C’était faux, et d’ailleurs déraisonnable, puisque dans les batailles, le défi n’était pas obligatoire.
  5. 17292 L tasance. Tous ces détails qui nous paraissent faire longueur, intéressaient à une époque où le duel judiciaire était considéré comme un appel au jugement de Dieu. Dans le Chevalier de la Charrete, Lancelot, avant son duel avec Méléaganz, rappelle que la bataille ne peut être sanz soiremanz, et Méléaganz demande aussitôt que l’on apporte les saints (les reliques). Édit. Fœrster, v. 4959-5006. Les deux passages mériteraient d’être comparés.