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les quatre fils aymon

Le reste de la narration (à partir de p. 53, v. 21 : A Monloon fu Charles, l’emperere al vis fier) est conforme pour l’ensemble au texte du ms. La Vallière, sauf pour le conseil des barons du roi Ys où l’on reconnaît la version de B C. et de l’Arsenal. Mais au commencement du pèlerinage, quand Renaud et Maugis se sont rencontrés à Constantinople chez l’hôtesse, l’arrangeur imagine de reprendre la version de B C, en ménageant une sorte de transition[1]. Il ramène en effet les pèlerins à Marseille d’où ils s’embarquent pour Acre. À partir de là, l’on a un texte d’après B C. jusqu’à l’endroit où Renaud refoule les Sarrasins dans Jérusalem (Michelant, page 410, vers 23) mais tandis que dans les versions précédentes les chrétiens ont à continuer le siège, nous voyons ici qu’ils ont pris la place et qu’une nouvelle guerre va commencer, où le trouvère mettra à profit ce qu’il savait de l’Orient par les croisades.

Naburdagant appelle à lui tous ses alliés, les rois d’Égypte et d’Inde la grant, les amiraux de Cordoue, du Larris, de Babylone. Dans un conseil, il est résolu, pour éviter de ruiner la contrée, de s’en remettre à deux champions dont la valeur décidera du sort de la Judée. Naburdagant demande qui veut se charger de la querelle des Sarrasins. Trois champions se présentent : Safadin, roi d’Égypte, en qui l’on reconnaît Seyfeddin, frère de Saladin ; Marados, roi des Indes, et un roi de Damiette. Safadin est désigné. Autant les païens ont montré d’empressement à s’offrir pour défendre leur parti, autant les chrétiens hésitent à accepter l’honneur de descendre dans la lice. En vain le roi David s’adresse au sire de Damas, au comte d’Acre, au maître des Templiers, au maître de l’Hôpital et aux autres barons. Nul ne veut se risquer en combat singulier contre le redoutable Safadin. Maugis engage son cousin à s’offrir. Renaud y consent et les chrétiens applaudissent. On retrouve fort à propos Froberge que Renaud avait cachée dans son bâton de pèlerin. Le combat entre Renaud et Safadin est longuement conté. À l’endroit où le manuscrit s’arrête, le chevalier chrétien a l’avantage. Ce premier duel était sans doute suivi de deux autres, puisque les Sarrasin

  1. J’ai publié cette fin du manuscrit de Montpellier dans la Revue des L. Rom. (1855, t. XXVII, p. 15-42 ; voir aussi mes Recherches, p. 11-38) ; mais je crois nécessaire d’en présenter ici un résumé.